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Van Eyck, une révolution optique

Gand expose la stigmatisation de Saint François

Les deux stigmatisations de Jan van Eyck (vers 1390-Bruges, 1441)

Non, vous n’avez pas la berlue, ce sont bien deux versions presque identiques de la Stigmatisation de saint François par Jan van Eyck que vous avez sous les yeux, en haut celle du Philadelphia Museum of Art (huile sur velin, 12,7 x 14,6 cm) et en bas celle de la Galleria Sabauda de Turin (huile sur panneau, 29,2 x 33,4 cm). Ces deux tableaux que l’on peut dater des années 1435-1440 sont actuellement présentés au Musée des Beaux-Arts de Gand dans le cadre de l’exposition Van Eyck "Une révolution optique" (1er février-30 avril 2020).

Pour les historiens de l’art, ces œuvres concentrent « presque tous les acquis de la révolution optique de Van Eyck : un réalisme et un illusionnisme sans pareils, un sens extrêmement raffiné de la perspective, des portraits fidèles, le rendu des textures et des surfaces, le jeu de la lumière et de l’ombre et un paysage aux caractéristiques géologiques, botaniques et atmosphériques jamais égalées. » Et de fait, la comparaison avec le tableau sur le même thème et presque contemporain attribué à Fra Angelico (lui aussi visible dans le cadre de cette exposition) montre combien les mondes artistiques flamand et italien sont à des années-lumière l’un de l’autre.

Saint François et l’Itinéraire

Dans un petit ouvrage consacré à ce tableau de Van Eyck, Claude-Henri Rocquet a cherché à montrer que l’artiste flamand avait pu s’inspirer de l’Itinéraire de l’âme vers de Dieu de saint Bonaventure (François et l’Itinéraire, Éditions Franciscaines, 2008, collection Chemin d’Assise). Sa lecture spirituelle de l’œuvre peut, aujourd’hui encore, nourrir une visite de l’exposition qui, pour sa part, se limite à l’histoire de l’art.

Parmi les détails de la scène médités par Claude-Henri Rocquet, figurent les deux cordes, celle de François et celle de frère Léon, dont les extrémités en viennent presque à se toucher : « Ces deux cordes, l’une vers l’autre, chemin de l’âme enténébrée vers l’âme illuminée, illuminée par l’amour du Christ et la vision de Dieu en lui ;ces deux cordes, fraternelles, signifient que l’homme est pour l’homme le chemin vers Dieu ; […] Ces deux cordes, d’un frère à l’autre, et l’une descendant plus bas, sur la terre, à la rencontre du plus faible, de l’endormi, est-ce qu’elles ne sont pas le symbole de l’Incarnation ? Dieu, du plus haut des Cieux, s’est fait homme pour que nous remontions vers lui, comme la brebis perdue, retrouvée, sauvée, et par lui, vers sa Lumière, notre patrie, notre royaume, la Paix » (François et l’Itinéraire, p. 46).

Pierre Moracchini, février 2020

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